loader image

La physiologie du jeûne

Comme il serait difficile de parler de la physiologie du jeûne sans parler de la physiologie en général, commençons par voir comment notre corps se maintient en bonne santé, c’est le métabolisme.

a) La régulation de l’apport alimentaire
Comment se régule notre poids sachant qu’il n’y a pas de cellules spéciales pour détecter un problème de poids ? On ne sait pas exactement mais plusieurs facteurs peuvent agir sur le poids. Nous citerons :
> La concentration de certains nutriments dans le sang
> Les hormones
> Les éléments psychologiques : stress, dépression
> Les signaux reçus du tube digestif et des sens

Une partie de notre cerveau appelée hypothalamus comporte deux centres nerveux de régulation qui sont :
> Le centre de la faim
> Le centre de la satiété
On estime que le centre de la faim fonctionne tout le temps mais qu’il est inhibé parfois par le centre de la satiété.

Comment fait le cerveau pour savoir si la personne est rassasiée ou a faim ?
Il y a deux théories, soit :
> C’est la baisse du glucose dans le sang qui réduit diminue la sensation de satiété, et appelle donc à manger soit
> Quand le tissu adipeux augmente alors l’apport alimentaire doit diminuer. Ce serait la libération des acides gras par le tissu adipeux qui activerait la sensation de satiété.
Mais on cite aussi l’effet dû à :
> La température du corps : la faim diminue lorsque la température augmente
> La distension de l’estomac et d’une partie de l’intestin appelée duodénum amenant la sensation de satiété
> L’arrivée dans l’intestin grêle, des triglycérides contenus dans les huiles végétales et les graisses animales, qui couperait la faim

Tout ceci peut bien sûr être perturbé par le psychisme : obésité, anorexie mentale, boulimie.

b) Quels sont les différents nutriments pour notre corps ?
On en compte 6 différents qui sont :
> Les glucides (G), les lipides (L), les protides (P), qui sont digérés par des enzymes et produisent respectivement des sucres simples, des acides gras, et des acides aminés
> Les vitamines qui sont des catalyseurs, éléments qui augmentent les réactions de digestion des G, L, P
> Les minéraux
> L’eau qui a 5 fonctions :
* C’est un solvant et un milieu de suspension pour tous les autres éléments
* Elle assure l’hydrolyse qui décompose les substances
* C’est aussi un agent refroidissant, l’évaporation amenant du froid
* Elle lubrifie
* Elle maintient la température corporelle

c) Qu’est ce que le métabolisme ?
Nos cellules et nos tissus se recyclent plus ou moins vite. En permanence notre corps se renouvelle, en détruisant de vieilles cellules et en créant de nouvelles. On appelle métabolisme le fragile équilibre entre les réactions de construction (anabolisme) et de déconstruction (catabolisme).
La construction ou anabolisme correspond par exemple à :
> La formation des protéines à partir des acides aminés au sein des cellules
> La formation du glycogène à partir du glucose
Toutes ces réactions de construction ont besoin d’énergie et libèrent de l’eau (déshydratation).

La déconstruction ou catabolisme correspond par exemple à :
> La digestion qui en les cassant, transforme les aliments en nutriments avant qu’ils soient assimilés par les intestins.
> La respiration de nos cellules qui transforme le glucose pour fournir de l’énergie
Toutes ces réactions de déconstruction ont besoin d’eau pour rompre les liaisons chimiques et libérer de l’énergie contenue dans les molécules.

En jeûne la déconstruction prévaut et c’est pourquoi il est si important de beaucoup boire.

Entre deux réactions de construction et de déconstruction se forme une molécule de réserve d’énergie appelée ATP. Sa durée de vie est inférieure à une seconde avant d’être utilisée, c’est dire la vitesse et le nombre de réactions chimiques en permanence actives dans notre corps !

d) Le métabolisme des sucres (glucides)
La digestion des sucres complexes de notre alimentation, comme les céréales par exemple, produit des sucres plus petits appelés glucose, fructose, et galactose.
Au cours de leur absorption par l’intestin grêle, puis de leur transport vers le foie, ils seront tous transformés en glucose. Les sucres des fruits ou du miel par exemple sont dits à digestion rapide ou simple, car ils contiennent déjà beaucoup de glucose et nécessitent peu de transformation par la digestion.

Et qu’arrive t-il à ce glucose ?
Il est tout d’abord utilisé comme énergie par les cellules qui en ont besoin, puis ce qui reste sert soit à la fabrication des protéines, soit à la fabrication du glycogène (maxi 500g) qui est stocké dans le foie (25%) et dans les muscles du squelette (75%). Cette fabrication du glycogène appelée glycogénèse est très importante car elle fabrique notre réserve d’énergie qui se libère dès que nous cessons de manger.
Puis lorsqu’il y a assez de glycogène c’est la lipogenèse qui convertit le glucose en graisses qui se stockeront de façon illimitée dans les tissus adipeux !
S’il y avait un excédent éventuel de glucose, il serait excrété dans les urines par les reins (diabète par exemple).

Comment le glucose pénètre t-il dans les cellules ?
Par diffusion facilitée par l’insuline qui comme une clé ouvre les cellules, sauf les cellules nerveuses et celles du foie.
La déconstruction du glucose aussi appelée « respiration cellulaire » se fait en deux étapes fournissant au total 34 molécules d’énergie pour 1 molécule de glucose !

Quelle fantastique production d’énergie : 1 molécule de glucose donne 34 molécules énergétiques, s’il y a suffisamment d’oxygène !
D’où l’importance de la bonne ventilation des poumons pendant un jeûne. C’est pourquoi il est recommandé de faire des respirations profondes et de l’exercice physique modéré.

S’il manque de l’oxygène dans les muscles (effort intense) cette transformation du glucose est incomplète et il se forme de acide lactique qui produit des crampes. Ceci s’arrête dès que le muscle est à nouveau bien oxygéné.
En voici une application : certains athlètes marathoniens qui veulent augmenter leurs réserves en glycogène qui s’épuise après 32 km de course, mangent beaucoup de glucides 3 jours avant la course. Mais provoque aussi des diarrhées, rigidité musculaire, dépression et léthargie !

e) L’anabolisme du glucose : ce qui se passe en jeûne
Lorsque le glucose sanguin diminue (hypoglycémie entre les repas) notre corps fabrique du glucagon et de l’adrénaline qui stimulent la libération du glycogène stocké en glucose utilisable. Le glycogène du foie est converti en glucose par une enzyme, alors que celui des muscles subit une étape intermédiaire. Il est converti en acides pyruvique et lactique, qui passent dans le sang pour être transformés dans le foie en glucose.

Après 4 heures environ le glycogène vient à manquer, alors il faut trouver du glucose ailleurs. Intervient la néoglucogenèse au niveau du foie qui va convertir les protéines et les graisses en glucose.
Cette réaction est stimulée par le cortisol et les hormones thyroïdiennes.

Après le repas
L’organisme met environ 4 heures à absorber complètement un repas moyen. Trois fois par jour ce sont donc près de 12 heures d’absorption et 12 heures de jeûne.
Durant ces périodes de jeûne quotidien, et la nuit surtout, le glucose qui entre dans le foie est converti pour partir via le sang dans les tissus adipeux pour stockage sous forme de triglycéride, ou vers les muscles pour stockage en glycogène.

f) En jeûne
Durant l’état de jeûne, le défi majeur de notre corps est de maintenir un taux normal de glucose dans le sang (de 0,7 à 1,1 g/l). Les cellules retirent constamment du glucose du sang mais le tube digestif n’en absorbe pas !
Le maintient de ce taux de glucose est surtout important pour le fonctionnement du système nerveux, car les neurones ne peuvent utiliser d’autres nutriments.

Pendant le jeûne le taux de glucose sanguin est maintenu de deux façons :
> par la fabrication de molécules de glucose à partir
o du glycogène du foie, qui permet de tenir environ 4 heures
o du glycérol issu du tissu adipeux
o du glycogène issu des muscles lors d’un exercice physique vigoureux
o de la transformation des protéines issues des muscles, qui intervient en dernier lieu
> par l’épargne du glucose en utilisant directement des triglycérides ou éventuellement des protéines pour produire de l’énergie.

Durant le jeûne les protéines des muscles ne sont transformées en glucose qu’après épuisement des réserves de glycogène du foie et des triglycérides du tissu adipeux.

Bonne nouvelle en jeûne vous perdrez votre graisse avant de perdre vos muscles !

En dépit de tous ces mécanismes d’approvisionnement en glucose sanguin, ceux-ci ne peuvent maintenir une glycémie suffisante très longtemps. Le corps doit donc effectuer un rajustement important durant l’état de jeûne.
Bien que le système nerveux continue à utiliser normalement le glucose sanguin, tous les autres tissus corporels réduisent leur consommation de glucose et utilisent les acides gras des tissus adipeux comme source principale d’énergie.

Le foie transforme des acides gras en corps cétoniques que le cœur, les reins, et le système nerveux peuvent utiliser comme énergie.

Grâce à cette épargne de glucose et à l’utilisation d’acides gras, il est possible de jeûner pendant plusieurs semaines à condition de boire de l’eau.

La glycémie ne baissera pas de plus de 25 % par rapport à la normale.